samedi, janvier 31, 2004
-252. First love song...

L'autre chanson du « Principe de plaisir », c'est celle-ci : « First love song » de Charlie O. Elle n'a pas été écrite spécialement pour le film, c'était une composition de Charlie. Je l'imagine très bien, le petit père Charlie, dans son petit studio, la nuit, après un gros chagrin d'amour, en train de chanter tout seul dans son anglais épouvantable et de souffler dans sa trompette. J'adorais cette chanson. Elle a été écrite pour un garçon, mais Charlie m'a autorisé à l'utiliser dans mon film hétéro. J'en ai fait la chanson d'amour de Titof et Daniela. Luigee en a fait un remix trip-hop pour le film. C'est une chanson merveilleusement bien écrite, un petit bijou inoubliable. Merci Charlie !

Titof et Daniela Rush.
vendredi, janvier 30, 2004
-253. Dru Berrymore.

Dru Berrymore. Je ne la connaissais pas. Patrick, mon ami et directeur de production depuis le début avait travaillé avec elle sur plusieurs films et il m'en disait un bien fou. Lorsque je l'ai vu arriver, en tenue de ville ordinaire - jeans, tee-shirt- pas maquillée, je l'ai trouvée tellement banale que j'ai cru que j'avais fait une erreur. Mais il était trop tard pour reculer, le tournage commençait le lendemain. « Le Principe de Plaisir », du moins ce qu'il en restait après les nombreuses coupes que j'avais fait dans le scénario initial était un film un peu expérimental. L'idée, pour dépenser le moins de sous possible, était de tourner les 9 scènes de sexe, plus la comédie en seulement trois jours de tournage. Pour ça, il fallait impérativement tourner à deux équipes en simultané. Pendant que je filmais en Betacam une scène dans un coin du décor, l'équipe numéro deux en tournait une autre, avec des petites caméras dv. Pour que cette contrainte de production ait un sens à l'image, j'avais inventé que le film raconterait le tournage d'un porno. Chaque scène devenait donc une scène du film en cours de tournage, un exercice de style indépendant, et pouvait n'avoir aucun rapport avec la précédente. Grâce à cette règle du jeu, on a pu improviser, pasticher, s'amuser. Dès le matin du premier jour, j'ai compris que Dru était une perle. Quand elle a débarqué sur la pelouse, maquillée, vêtue de sa petite robe verte, coiffée de son grand chapeau et cigare à la bouche pour interpréter le rôle de la productrice pète-sec, elle avait une incroyable présence.

La première scène de cul tournée par une seconde équipe a eu lieu l'après-midi même. C'était une scène entre HPG, Titof et Dru. J'ai confié une caméra à HPG et une seconde à mon monteur, Fred, pour qui c'était un baptême du feu. Je leur ai demandé à tous les quatre de ne pas s'occuper de scénarisation mais de mettre en boîte la scène la plus folle, la plus intense possible, en toute liberté et en tournant tout à deux caméras, même leurs délires. Je les ai abandonnés dans le salon pour aller tourner, dans une chambre à l'étage, la scène d'amour entre Titof et Daniela. La maison qu'on avait louée était grande mais pourtant, à l'étage, on s'est vite mis à ne plus rien entendre que les hurlements de Dru et des garçons venus d'en bas. On est descendus voir. C'était un spectacle hilarant. Dru insultait les garçons parce qu'ils ne la baisaient pas assez fort. HPG et Titof (résistants, pourtant) n'arrivaient pas à suivre son rythme. Ca riait, ça déconnait et ça y allait à fond. Je crois qu'ils ont déliré comme ça pendant quatre heures et puis les garçons ont jeté l'éponge.

Ils n'en pouvaient plus. Au montage, on a essayé de respecter la folie et l'énergie de cette scène exceptionnelle. A chaque fois que je la revois, je ris. Pourquoi je raconte ça ? Parce que ça m'a appris deux trucs, professionnellement. Un, que j'étais pas indispensable. Cette scène est l'une des meilleures du film et je n'y ai pas participé directement. Deux, que la spontanéité, l'énergie valaient, dans un porno, dix fois plus que la perfection formelle. Depuis, j'ai changé ma façon de bosser. Je tourne moins propre, mais avec plus de jus.

Dru et le manche de pioche... Encore de la "chair morte", madame Breillat ?
jeudi, janvier 29, 2004
-254. Quand le plaisir est partagé...
Reçu aussi des TAS de commentaires à propos de l'histoire d'hier... Wilfried ("... parce que moi aussi j'ai été agressé, parce que moi aussi j'ai été tailladé et que, merde, c'est à cause de ça que je mords la vie à pleines dents et que je n'ai plus honte de dire merde aux cons (Qui sont pourtant mes putains de frères humains... "Gérard ? Une bière !")... C'est à cause de ça que j'ai décidé d'emmerder (D'enculer ?) les jours impairs et de le faire avec volupté."), François, brillant comme d'hab ("... Le mécréant que je suis ne crois pas au paradis là-haut et encore moins ici-bas. Exit donc le paradis. Mais le sexe heureux, ça oui. Pas toujours, bien sur, mais oui ! Quand le courant passe, quand le désir est réciproque, quand l'alchimie fonctionne, quand le plaisir est partagé, alors oui, le sexe est heureux. Et ça, c'est l'antithèse du viol. Le viol que Linda Lemay appelle "faire la haine" par opposition à "faire l'amour". Belle formule, non ?..."), Audrey, tendre et triste, André Marc ("... quand va-t'on se rendre compte que tout ça finit dans une boite à sapin et qu'avant c'est d'amour dont on a besoin... [...] salut. quéquette en berne aussi......" )
Bisous à tous.
Du cul, du cul !!!
Ah oui, bonne idée, ça.

L'admirable, l'incroyable Dru Berrymore, avec Titof dans le "Principe de Plaisir". J'aime beaucoup cette scène-là et pourtant, je ne l'ai pas tournée moi-même. Je vous raconterai ça demain, ça me met de bonne humeur rien que d'y penser.
mercredi, janvier 28, 2004
-255. Comment il disait, Souchon ?
Soliloque n° -255. Viol.
Comment il disait, Souchon ? Le dégoût. Cette boule dans le ventre, muscles serrés, coincés. Et l'envie diffuse de se lever de son siège, de partir en courant droit devant. Courir, pour se débarrasser de ça. La crasse, tout d'un coup, l'horreur posée là, absurde, au milieu d'une journée qui s'annonçait normale, donc, normalement consacrée à mon métier ordinaire et futile de pornographe. J'ai pas pu travailler, écrire des histoires aphrodisiaques, parler de plaisir, raconter le sexe après ça ?
Je parle de qui, là ? Je parle de quoi ? Démerdez-vous, suivez le feuilleton, y'a des liens sur cette page, faites votre boulot de lecteur et suivez-les. Si je prends la plume c'est pour dire que cette histoire, survenue à des gens que je ne connais pas dans une ville que je ne connais pas m'a profondément bouleversé. Elle touche au cour de ma névrose, à la douleur intime, la violence du monde et à cet irrépressible besoin qu'on a tous de s'inventer des paradis pour s'en protéger. Elle me met à nu, m'expose en tant que montreur de sexe, me met en danger, me fait douter. Et si le paradis du sexe heureux que j'essaie d'inventer jour après jour n'était rien d'autre qu'un mensonge ? Un dangereux mensonge, qui plus est. Une de ces fables fascinantes qui font que les crétins se prennent pour Barbe Bleue, que les mal éduqués s'imaginent que les femmes sont des objets et que leurs propres pulsions sont un droit naturel ? Je n'y crois pas, bien sûr que je n'y crois pas. Mais, putain, fallait que j'en parle, juste pour partager le poids de ce sac à dos-là. Oh.. Des fois.. Comme le monde est vide, comme le monde est laid !!!
Michel ?... Whisky !
Retourné au bureau après avoir écrit ça à la pizzeria. Resté tard. Pas pour travailler. Je me suis branlé pendant deux heures sur des live-shows internet. Cette image inoffensive et bête d'une sexualité dédramatisée et coupée du monde. J'ai pas pu jouir.
"The love you take
Is equal to the love
You make."
The Beatles.
mardi, janvier 27, 2004
Merde!!!!!!!!!!!!!
-256. La baguette magique hongroise.

Un peu de beauté dans un monde de brutes : Melissa Lauren, 18 ans, le jour de notre rencontre. Elle est depuis devenue une hardeuse qui tourne beaucoup.... C'est ça que madame Breillat appelle de la "chair morte ?"
lundi, janvier 26, 2004
-257. Les hirondelles.
Tiens, vous pouvez même l'écouter en lisant les paroles. C'est bien, hein ?
"Les filles sont jolies comme des hirondelles
On prie quand on les voie pour que le jour finisse
Que le sommeil arrive et que l'on rêve d'elles
Et du centre du monde au sommet de leurs cuisses
Les filles, les filles.
Les filles, les filles.
Quand les beaux jours arrivent on devient malheureux
On est jaloux du vent qui leur fait des caresses
On les suit dans la rue, on se brûle les yeux
A guetter le soleil qui dessine leurs fesses
Et puis l'une s'arrête, attend qu'on la rejoigne
Ondule devant nous pour montrer le chemin
On court, on la poursuit, on a peur qu'elle s'éloigne
On entre à ses côtés en un lieu clandestin
Les filles, les filles.
Les filles, les filles.
Un hôtel, une chambre, un lit sous la fenêtre
Son corps entre nos mains, nos lèvres sur les siennes
Elle s'offre tout entière et quand on la pénètre
On entend le soleil qui rit sous les persiennes.
Les filles, les filles.
Les filles, les filles."
Cette chanson-là, je l'ai écrite pour un film qui n'a jamais vu le jour. Trop cher. Ce film s'appelait « Le principe de Plaisir ». C'était une balade parisienne. Il racontait les aventures sentimentales et érotiques de Pipo, un petit gigolo de province en goguette dans la capitale. Ce petit gigolo (interprété par Titof) faisait la connaissance d'une milliardaire américaine (Dru Berrymore) et s'entichait de sa jeune secrétaire (Daniela). Mais Daniela le rejettait en lui disant « Tu es une petite pute, et moi je n'aime pas les petites putes. »

« Tu es un petit acteur porno. Et moi, je n'aime pas les petits acteurs porno. »
J'ai gardé seulement le titre, l'idée du casting et la trame centrale de ce scénario pour l'incorporer dans un projet beaucoup moins ambitieux. J'ai aussi gardé cette chanson. Luigee l'a mise en musique, Dom Farkas l'a chantée. Elle m'a servi à accompagner la scène des artistes peintres.

Il y a une autre chanson dans ce film. Mais c'est une autre histoire, je vous la raconterai un autre jour.
Ah oui, Audrey m'écrit pour me parler de Catherine Breillat.
"Hello!
Je te recopie ce passage croustillant d'un papier sur le dernier film de Breillat, avec les commentaires de la dame (connasse...) "(...) cette fois ci elle y va carrément, loue les sevices d'une hardeuse pour doubler Amira Casar, la scène est montée, on décèle à peine l'interchangeabilité des corps. "Mais ce n'est pas de la pornographie, ajoute-t-elle, (Breillat, bien sûr...) la pornographie, c'est de la chair morte, sans âme" (Trouvé dans le magazine télé des inrocks, article de Nathalie Dray.)
Heureusement qu'elles existent les hardeuses inommables, pour doubler les actrices très nommables, elles, et qui font pas de porno, elles , surtout, hein!
Ca m'énerve, ca m'énerve...
Bises.
Aud'.
Hin hin. Je peux mettre une deuxième couche? Ok. Quelle c..., cette Breillat ! Attirance, répulsion, quand tu nous tiens... Vous vous souvenez de mon post sur la schizophrénie des médias, et celui sur le sexe dans le cinéma français ? Pauvre femme... Elle qui n'a jamais su filmer que la souffrance, la punition, l'impuissance... Parler de chair morte, ça lui va bien. On y reviendra.
dimanche, janvier 25, 2004
-258. Le meilleur représentant du porno chic.
mon premier message et déjà une question (ahlala, imaginez si vous étiez rémunéré à chaque fois qu'on vous en pose une!) [.] Je voudrais savoir ce que vous pensez d'Andrew Blake et de ses prod. , car à part des commentaires du style "ya pas d'scènes d'cul c'est de la merde, c'est trop lent, je veux du sex moa" (à lire avec le bel accent du nord), j'entends pas grand chose
cyril."
Andrew Blake, tout le monde connaît pas. C'est un réalisateur américain qui fait des films très « chics », avec des filles somptueuses dans des maisons de rêve, maquillages et costumes soignés, mise en scène chichiteuse (courtes focales, travellings, ralentis, effets de couleur) sur des musiques de jazz cool ou d'easy leastening genre clips de mode. Souvent fétichiste (suçage de talons aiguilles, cuir et fouets. ), toujours très lent. J'en pense quoi ? Sexuellement c'est pas ma tasse de thé. Je suis incapable de me masturber devant un Andrew Blake. Trop artificiel, trop distancié, aucune spontanéité, aucun plaisir réel. C'est un monde d'apparences pour moi soporifique. Même le catalogue de la Redoute est plus chaleureux. Mais ma sexualité, on s'en fout. Andrew Blake est un excellent technicien, un type raffiné, il respecte ses acteurs, ses actrices et son public. Il y en a qui adorent et c'est bien normal.

Pourquoi j'en parle hic et nunc ? Pour faire le lien avec le post de vendredi sur le porno chic. Andrew Blake en est certainement le représentant le plus convaincant. Dans son porno politiquement correct, il n'y a pas un poil qui dépasse, aucune faute de goût. Tout est léché, huilé, astiqué, poli, codifié, désinfecté, prévisible, apprivoisé. Résultat des courses, pour votre serviteur (comme pour quelques autres, apparemment), ça ne fonctionne plus sexuellement. Dans un porno, je guette avant tout l'engagement, le don de soi des acteurs et actrices, la force du désir, la folie. Et là, je ne vois que de la belle gymnastique au ralenti. Du porno décoratif, du porno mou qui me laisse mou.

"Arrête tes conneries, John, c'est super bon, Andrew Blake !"
Paul Lux m'envoie un lien vers un livre pour enfants politiquement inkorrekt, un peu punk et très mignon. "Henri, le lapin à grosses couilles", par LL de Mars. http://www.pastis.org/jade/jadecomix/pages/lldemars/henri/henri0.htm
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